Notre coeur de métier : dans les coulisses de notre troupeau laitier
En vous parlant de l’histoire de la ferme, on s’était arrêté à Bruno, qui s’est installé en 1987 sur la ferme. On aimerait maintenant vous parler de ses fils, Florian et Gauthier (la 4ème génération !), et des projets qui ont vu le jour ces dernières années !
L'unité de méthanisation est maintenant en route et Gauthier finit ses études.
Historiquement, la ferme Christ était relativement classique pour le secteur du Kochersberg : environ 70 vaches à la traite, 130 hectares de cultures, un robot de traite. Avant l’arrivée de Florian en 2014, Bruno était seul sur la ferme et la décision avait donc été prise, en 2008 d’installer un robot pour la traite des vaches. Pourquoi ?
Une vache doit être traite en général deux fois par jour, à la même heure tous les jours, toute l’année.
Pour l’éleveur, la traite peut donc constituer une contrainte importante quand elle est réalisée avec une machine à traite : l’éleveur branche ce que l’on appelle un « gobelet » sur le trayon de la vache pour la traite. Dans ce cas, l’éleveur est présent pour la traite de tout le troupeau, et s’assure que tous les animaux se portent bien. Avec un robot de traite, c’est le robot qui connecte les gobelets trayeurs. Chaque vache est équipée d’un boîtier qui permet au robot de la reconnaître puis elle se placer au niveau du robot dont le « bras » va venir sous la vache pour détecter les trayons et brancher les gobelets sur chaque trayon.
Pour la vache, l’expérience de la traite est similaire.
Pour l’éleveur, le robot offre de la flexibilité puisqu’il n’a pas besoin d’être présent pendant la traite, ce qui est particulièrement intéressant lorsque celui-ci est seul sur la ferme. Mais attention : l’éleveur passe dans les deux cas tout autant de temps avec le troupeau ! C’est l’organisation du travail dans la journée qui est différente dans les deux cas.
En parallèle de l’installation de Florian et du projet de méthanisation, se posait la question de l’installation de Gauthier. Eleveur, il souhaitait revenir sur la ferme pour s’occuper des vaches. Mais la problématique restait la même que pour l’installation de Florian : la ferme, telle qu’elle existait, ne permettait pas d’assurer un revenu décent à une personne supplémentaire.
Or, Christian, l’associé de Florian sur l’unité de méthanisation et un ami de ses parents, était également en pleine réflexion par rapport à l’activité laitière sur sa ferme. Les fermes des deux familles étaient similaires, avec un troupeau d’environ 70 vaches et un robot de traite. Mais chez les Richert, l’éleveur est Gérard, le père de Christian. La retraite de Gérard s’approchant, le futur de l’activité laitière posait question.
Une solution qui permettait à la fois à Gauthier de s’installer et au troupeau des Richert de perdurer était de fusionner les troupeaux. Christian s’associerait sur la ferme Christ, les vaches en lactation (qui ont eu un veau et produisent du lait) et une partie des génisses (une vache qui n’a pas encore eu de veau) seraient sur le site historique de la ferme Christ et le restant des génisses seraient sur le site historique de la ferme Richert.
Le projet était tout de même complexe, puisque c’est toute la gestion des fermes qu’il fallait revoir : l’organisation du travail, l’utilisation des bâtiments, la gestion du troupeau, etc.
La nouvelle étable des vaches laitières, construite pendant l’hiver 2017-18.
La première étape était de construire une nouvelle étable pour les vaches en lactation, puisque l’étable à Woellenheim n’était pas suffisamment grande pour accueillir l’ensemble du troupeau. Le bâtiment a été construit pendant l’hiver 2017-2018, et les vaches y sont entrées fin janvier 2018.
Avec la construction d’un nouveau bâtiment, il y avait la volonté de remettre les vaches laitières au pâturage.
Il faut se souvenir qu’en plaine d’Alsace, les laitières ne pâturent que rarement, pour plusieurs raisons :
Premièrement, la météo ! Les hivers alsaciens sont froids et les étés chauds, donc la période où l’herbe pousse suffisamment pour alimenter le troupeau est relativement courte : nous avons plusieurs semaines au printemps, et si la météo le permet, une deuxième « saison » vers la fin de l’été-début de l’automne. Mais ce n’est dans tous les cas pas suffisant pour nourrir les vaches laitières uniquement avec de l’herbe pâturée ;
Deuxièmement, parce que les terres sont historiquement utilisées pour la production de céréales et de maïs, avec de très bons rendements.
Cependant, nous avons choisi de nous lancer dans cette aventure, et la décision a été prise de transformer le champ autour de la nouvelle étable en pâture.
Les laitières au pâturage !
On va vous le dire tout de suite : la première année était un fiasco. On s’attendait à voir les vaches se précipiter dehors et ne plus vouloir rentrer. C’était l’inverse… Les vaches aiment bien avoir leurs habitudes, et à part celles qui étaient dans les pâtures l’année précédente (avant leur premier veau), les autres n’étaient pas sorties depuis plus longtemps. En plus, il faisait chaud et la vache est en stress au-dessus de 25°C, n’aime pas le soleil direct, ou le vent, ou la pluie. Donc on avait tout faux pour notre première tentative.
On peut penser qu’il n’y a rien de plus simple que de sortir une vache au pré, mais c’est très technique si on veut bien faire ! Il faut les sortir au bon moment, maîtriser la pousse de l’herbe et le pâturage des vaches, s’assurer qu’elles continuent à voir une alimentation équilibrée, etc.
2020 est notre 3ème année et heureusement, ça se passe de mieux en mieux : les vaches ont pris leurs habitudes, et les éleveurs continuent d’apprendre !
Au final, les vaches laitières pâturent au mois 6h par jour, 120 jours par an.
Les génisses au parc.
La deuxième étape est de revoir l’élevage des génisses.
Si les vaches en lactation (c’est-à-dire qui produisent du lait) ne pâturaient plus sur le ferme, les élèves, c’est-à-dire les animaux qui assurent le renouvellement du troupeau, étaient par contre en pâture entre (à peu près) mars et novembre. En hiver, les génisses sont aujourd’hui réparties sur différents sites, mais ça complique le travail et prend plus de temps.
Nous avons donc décidé de rénover un ancien hangar à tabac, qui ces dernières années servaient pour le stockage de paille ou pour entreposer des machines. Ce nouveau bâtiment servira à regrouper une grande partie des génisses sur le même site que les vaches laitières, et leur donnera également accès à une pâture.
Nos premières jersiaises !
En parallèle de toute cette ré-organisation, nous avons choisi d’élever une nouvelle race de vache laitière : la Jersiaise !
La Jersiaise est l’une des races qui valorise le mieux l’alimentation : pour la même quantité de fourrages ingérée, elle va produire plus de lait qu’une Prim’Holstein. Et dans le contexte actuel de changement climatique, qui augmente l’incertitude des récoltes, on apprécie la possibilité de pouvoir produire la même quantité de lait avec un tiers de fourrages en moins.
La Jersiaise est plus résiliente que la Prim’Holstein, moins sensibles aux maladies et produit un lait très riche en matière grasse et en protéine. Grâce à son petit gabarit, elle est hyper bien adaptée au pâturage : une vraie tondeuse à gazon !
Au final, on est conquis, même si elles ont un sacré caractère (toujours les premières à faire des bêtises). Et on adore leurs yeux de biche !
Vous l’aurez donc compris, les projets s’enchaînent sur la ferme. Et pour être honnête, ce n’est pas fini !
Notre objectif aujourd’hui est de produire de la qualité et de maîtriser nos produits jusqu’au bout, en arrivant à vivre (nous et nos collaborateurs) de notre métier, dont notre troupeau laitier est véritablement le coeur.